Redéfinir le métier d’enseignant. Faisons le point calmement.

Le ministre : La fonction professorale doit prendre un sens nouveau.
Le journaliste (celui que vous voulez du moment qu’il n’y connait rien) : C’est ce que vous appelez la redéfinition du métier d’enseignant.
Le ministre : Tout à fait. Elle accompagnera la juste revalorisation.
Le journaliste : 10 milliards d’ici 2037…
Le ministre : C’est une base. Ce sera peut-être plus…
Emmanuel Macron : Doucement… Doucement… C’est leurs impôts quand même.
Le ministre : Ce sera un effort historique tel qu’on n’en a jamais vu dans l’histoire du passé.
Le journaliste : Mais concrètement à quoi elle ressemblera cette revalorisation ?
Le ministre : Il est peut-être un peu tôt pour en parler… Cela se fera dans le dialogue et après une grande concertation dans mon bureau dont la porte est, je le rappelle, ouverte et cryptée.
Le journaliste : Nous allons demander à un observateur très attentif de la situation de nous dire comment il voit l’avenir de la profession d’enseignant. Bonsoir Gilles-Edouard…

Gilles-Edouard : Un bon professeur c’est d’abord quelqu’un qui maîtrise les fondamentaux de sa discipline. Il a une solide connaissance de son domaine. Comme on dit à propos de monsieur Gabriel, notre professeur d’Histoire-Géo, il doit avoir avalé Wikipédia…
Le ministre : C’est pour cela que nous réformons la formation et les concours.
Gilles-Edouard : C’est ensuite quelqu’un qui doit avoir de l’empathie pour ses élèves, qui doit savoir être à leur écoute et donner de son temps pour les accompagner.
Le ministre : C’est pour cela que nous mettrons au plus tôt les futurs enseignants face à des classes afin qu’ils prennent bien conscience de la dimension comportementale nécessaire à acquérir.
Gilles-Edouard : Il doit aussi savoir évaluer souvent et avec justesse nos devoirs.
Le ministre : L’évaluation est la clé de la réforme qui a été introduite depuis deux ans. Au lycée mais aussi au collège et en primaire. Et bientôt, je vous le rappelle, dès les échographies, nous chercherons les indices de futures difficultés scolaires pour les éradiquer.
Le journaliste : On voit donc qu’il y a adéquation entre les attentes des élèves et les réformes mises en place. Merci Gilles-Edouard. Merci monsieur le ministre.
La régie : C’est bon, on a rendu l’antenne…
Le journaliste : Merci, monsieur le ministre. Nous avons fait une bonne émission… qui ne manquait pas de pédagogie et de vérité, je crois.
Le ministre : Tout à fait. Vous venez toujours jeudi avec votre femme ?
Le journaliste : Euh non, si cela ne vous gêne pas, je préférerais vendredi avec ma maîtresse.
Le ministre : Alors, disons samedi et vous venez avec les deux…
Le journaliste : Cela ne va pas vous déranger ?
Le ministre : Vous pensez, ce sont les Français qui payent.
Le journaliste : Quant à vous, Gilles-Edouard, bon retour à Prague.
Gilles-Edouard : Merci, monsieur… Est-ce que je peux faire un selfie avec vous et monsieur le ministre ?
Le ministre : Mais avec plaisir… Cela me rappellera le dernier congrès de LaREM.
Le journaliste : Vous avez fait beaucoup de selfies ?
Le ministre : Non, un seul. mais il y avait plus de monde dessus que dans la salle…
Gilles-Edouard : On fait un sourire… Ah ben zut, pourquoi on est cinq sur le selfie ?
Le ministre : Cinq ?
Kevin : Ah ben oui, vu qu’on peut plus arriver à vous voir rapport à ce que votre porte ouverte est maintenant cryptée et que j’ai pas eu la spécialité NSI pour faire de la programmation de jeux vidéo, on s’est dit avec Charlotte qu’il fallait vous chercher ailleurs.
Charlotte : Et, à part à Schtroumpf Magazine où vous allez jamais, il y avait l’embarras du choix… Mais on s’est dit que vous deviez être à la télé dans une émission de grande écoute comme à chaque fois que ça va mal pour vous.
Le journaliste : Mais qui est-ce ?
Gilles-Edouard : Mais qui sont ces jeunes affreusement mal élevés ?
Le ministre : Clémentine et Robin…
Charlotte : Non, Charlotte et Kevin… Représentants nationaux des CVL…
Le ministre : Un truc que j’ai pas encore eu le temps de supprimer.
Kevin : Alors, on était venus voir si vous aviez enfin décidé de supprimer les E3C parce qu’on a plein de messages insta de jeunes qui craquent, qui pleurent en cours, avant les cours, après les cours.
Charlotte : Il y en a même qui ne peuvent plus venir au lycée et qui pleurent à la place des cours.
Gilles-Edouard : Eh bien, envoyez-les en Australie. Ils ont besoin d’eau…
Charlotte : Mais il sort vraiment d’un lycée de Prague, lui ?… Ce n’est pas possible qu’il ait notre âge.
Le journaliste : Ah, je ne sais pas. C’est le directeur de cabinet du ministre qui nous l’a présenté.
Le ministre : Ah mais pas du tout… C’est la production qui l’a trouvé.
Gilles-Edouard : Ecoutez, je suis bien au lycée français de Prague où mon père est professeur de philosophie.
Charlotte : Eh bien, bravo pour le bilan carbone de votre émission.
Gilles-Edouard : Vous savez, c’est mon père qui a lancé le mouvement des stylos verts…
Kevin : Je croyais qu’ils étaient rouges les stylos…
Gilles-Edouard : Il y a les rouges qui n’aiment pas monsieur Blanquer et sa politique… Et il y a les stylos verts qui savent quelle œuvre de redressement national et moral a été introduite par notre grand ministre.
Charlotte : Ok… Alors, quand on aura les stylos bleus et les stylos noirs, on pourra avoir un quatre couleurs. Et ça va gueuler dans la trousse…
Le journaliste : Faut-il que j’appelle la sécurité ?
Le ministre : Ils ont des LBD ?
Le journaliste : Ah non, je ne crois pas…
Le ministre : Alors, on s’en passera. Je tiens à ce que tout se passe en toutes circonstances selon la doctrine de sécurité édictée par mon camarade Christophe Castaner.
Le journaliste : Il y a une doctrine de sécurité édictée par Christophe Castaner ?
Le ministre : Vous ne l’avez pas vue ? Elle était dans son dossier l’autre jour quand nous sommes tous allés ensemble à un petit-déjeuner de travail…
Charlotte : Non mais ça va pas ?!
Le journaliste : Qu’est-ce qui se passe encore ?
Charlotte : Gilles-Edouard m’a pincé les fesses…
Gilles-Edouard : Je m’inscris en faux contre cette allégation et je vais de ce pas prévenir mon avocat.
Le ministre : Bon, qu’on en finisse… Qu’est-ce que vous voulez encore ? Supprimer les E3C ? C’est non puisque nous sommes prêts.
Charlotte : Pour quelqu’un qui est tout le temps dans les médias, vous ne lisez pas assez la presse. Tout le monde commence à dire que ça va être un carnage…
Kevin : Mais là, on vous a entendu parler des profs et de la relavo… ralevo… ravalosisation…
Le ministre : Revalorisation…
Kevin : Voilà c’est ça… Leur filer plus de sous c’est ça… Et puis vous avez aussi causé de la resignification du métier…
Le ministre : Redéfinition…
Kevin : Voilà c’est ça… Mais pourquoi vous prenez que des mots compliqués ?
Gilles-Edouard : Des mots compliqués ?
Kevin : Ah ben oui… Il parle comme les sujets d’histoire sur la Révolution française…
Charlotte : Alors, on avait envie de vous dire que les profs tels qu’ils sont, ils nous vont bien. Et que c’est pas la peine de faire votre tambouille.
Kevin : Oui, comme quoi, il faut tout remettre à zéro… Comme elle dit toujours ma mémé, c’est dans les vieux pots qu’on fait les meilleurs resets.
Gilles-Edouard : Il est drôle !
Kevin : Toi, tu retouches à un cheveu des fesses de Charlotte et je te décalque sur la caméra.
Le journaliste : Allons, les jeunes !… Allons !…
Charlotte : Moi, quand je vois que madame Lepic, ma prof de SVT, elle nous envoie des messages à des 7 heures 30 du matin ou à des 23h15 pour nous aider, je veux pas qu’on la redéfinisse.
Kevin : Oui… Attends, à 7h30, je suis toujours au pieu moi… Et à 23h15, je suis sur la Play… Alors, ça veut dire que madame Lepic, elle dort jamais et elle joue jamais. C’ets pas une vie ça !
Charlotte : Après, j’ai travaillé la question en EMC et vos nouveaux profs, vous allez les payer que dalle.
Kevin : Oui… Même que les profs de gym, ils auront plus à faire de gym au concours… Tu vois le truc ?… Monsieur Gradouble le prof de SVT, 1m55, 108 kilos, il pourra faire prof d’EPS…
Gilles-Edouard : Pratique ! Il pourra faire les contrôles antidopages en même temps.
Le ministre : Une certaine évolution, mesurée et raisonnée, vers la bivalence n’est en effet pas à exclure.
Charlotte : Mais alors, s’il enseigne plusieurs matières en même temps, comment il fera pour être au point sur chacune d’elles ?
Kevin : Eh oui… Comment qu’il fera ?
Le ministre : Nous allons mettre en place des formations complémentaires pendant les vacances…
Charlotte : Mais ils en ont besoin de leurs vacances les profs ! C’est ça votre idée, les faire bosser 365 jours par an… Tout en continuant à les traiter de feignasses.
Kevin : Et 366 les années bi-textiles…
Le journaliste : Monsieur le ministre, je suis désolé de cette intrusion…
Le ministre : Laissez… Laissez… Ils m’amusent… Presque autant que Marie-Estelle…
Charlotte : Vous savez combien de nos profs sont surmenés ?
Gilles-Edouard : Avec tous les jours de grève qu’ils font en ce moment, pas beaucoup…
Kevin : Ils tombent comme des mouches… Même nous, on tient mieux le coup… Faut dire qu’on travaille moins…
Charlotte : Alors, vos nouveaux profs avec leurs nouvelles missions, pouet-pouet.
Le ministre : Quoi ?… Pouet-pouet ?…
Kevin : Vous oubliez… A la place, vous leur filez plus de blé pour qu’ils soient dignes un minimum… Même chez moi, au lycée de Grigny, ils sont plus mal habillés que les élèves. Tex pour les hommes, Desigual pour les femmes.
Charlotte : Chez moi, ils vont mettre leurs voitures dans un parking fermé pour que personne ne voit qu’ils ont des Clio et des 206…
Gilles-Edouard : Chez nous, il y en a qui a eu besoin d’argent. On s’est cotisé, on lui a offert une tirelire. C’est gentil, non ?
Kevin : Ta gueule !
Le journaliste : Monsieur le ministre, je…
Le ministre : Laissez… Laissez… On se croirait au Conseil Supérieur des Programmes… Avant…
Charlotte : Bref, y a rien à définir… Juste avoir le courage de mettre sur la touche quelques taches…
Kevin : On a les noms si vous voulez… On a lancé une grande consultation sur Google Forms… Et alors, le premier de la liste, c’est un certain Hervé-Raymond Labuche de Plaignoncourt, prof au lycée français de Prague.
Gilles-Edouard : Papa !…
Charlotte : Alors lui c’est la complète comme on dit à Rennes… Méprise ses élèves, note à la tête, ne supporte pas les filles, lit son cours assis au bureau, fait des interros écrites dès que quelqu’un pose une question…
Le journaliste : Ah, j’en ai connu un comme ça…
Charlotte : C’était peut-être le même… Alors ceux-là, vous pouvez les redéfinir, monsieur le ministre. Mais les autres, laissez-les vivre un peu !…
Le journaliste : Des élèves qui soutiennent les profs, on aura tout vu.
Le ministre : Vous, vous oubliez de venir samedi…
Le journaliste : Non, monsieur le ministre…
Le ministre : Et soyez heureux que je ne dise pas à votre maîtresse que vous avez une femme…
Le journaliste : Monsieur le ministre… Nous avons fait une si belle émission…
Charlotte : J’espère que vous avez pris des notes…
Le journaliste : Des notes ? Pour quoi faire ?…
Kevin : Voir comment on met un ministre en difficulté en lui mettant le nez dans sa merde…
Charlotte : Et comment on doit faire attention quand on choisit un témoin… Vous voyez, on nous apprend encore 2 3 trucs au lycée.

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